Face au défi de la décarbonation balisé par la Stratégie nationale bas-carbone, le secteur des déchets opère un virage majeur. Si les obstacles restent nombreux, les technologies de transition, associées aux efforts incontournables en matière de sobriété, doivent permettre d’atteindre les objectifs d’ici le milieu du siècle.
En France, le secteur des déchets est responsable de l’émission de 15 millions de tonnes d’équivalent carbone par an. Si elles ne représentent que 4 % des émissions nationales, il n’en reste pas moins qu’elles stagnent depuis 2015.
Dès lors, le défi est de taille pour adapter la filière à la Stratégie nationale bas-carbone qui vise à la neutralité carbone en 2050. D’ici 2030 par exemple, ses émissions devront avoir été réduites par 2,5. Force est de constater que la marche est haute, dans un contexte où, facteur aggravant, la production de déchets ne faiblit pas.
Forte dynamique
Il existe néanmoins de nombreux points qui permettent de rester optimistes. La filière des déchets fait preuve d’une forte dynamique en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. À titre d’exemple, les courbes montrent que l’enfouissement des déchets sera divisé par deux en 2028 par rapport à 2010, avec un retard particulièrement faible par rapport aux objectifs. Au rythme où vont les évolutions du secteur, ses émissions de GES auront diminué d’un tiers en 2030 et de la moitié en 2050 par rapport à 1990.
Par ailleurs, tout indique que le secteur se donne les moyens d’augmenter le tri à la source des biodéchets et qu’elle se prépare à l’explosion prévisible de la filière de la valorisation des CSR (combustibles solides de récupération).
L’innovation au secours de la décarbonation
Cependant, un constat s’impose : les investissements dans les technologies de transition doivent s’accélérer. Une réflexion est par exemple nécessaire sur les gaz de nouvelle génération, issus notamment de la pyrogazéification, qui pourraient largement contribuer à décarboner l’activité de gestion des déchets en utilisant le réseau de gaz naturel qui est très bien entretenu.
Autre exemple : s’il reste un gros travail à faire sur le sujet des émissions diffuses des stockages de déchets, la captation et la valorisation du carbone issu des émissions canalisées (fumées des unités de traitement entre autres) pourraient rapidement progresser, notamment par la mise en place de procédés visant à augmenter la teneur de CO2 dans ces fumées pour le transporter et le stocker.
De même, la transformation biologique du CO2 pour produire des microalgues est une piste à suivre, ainsi que la minéralisation du carbone pour obtenir des carbonates susceptibles d’être utilisés dans le secteur du bâtiment.
Sobriété et prévention
En conclusion, la filière, incontestablement, est à la manœuvre. « Nous sommes en train de transformer totalement le modèle du déchet et de ses différents usages, affirme Antoine Bousseau, président de la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (Fnade). Et nous pouvons vraiment accélérer ».
Un constat complété par Mickaël Thiery, sous-directeur de l’action climatique au sein de la Direction générale de l’énergie et du climat, qui met le doigt sur l’action à mener en amont de la production de déchets : « Sobriété et prévention sont un levier fort pour la filière. La généralisation de l’affichage des impacts environnementaux des produits doit notamment se poursuivre ».