L’utilisation des matériaux alternatifs en BTP : peut mieux faire !

De nombreuses dispositions, notamment d’ordre réglementaire, sont prévues pour favoriser la valorisation de déchets en tant que matériaux alternatifs en BTP, économiser les ressources naturelles et promouvoir le développement de produits et procédés bas carbone. Il s’agira du thème de l’atelier 2 des prochaines Assises des déchets.

Ces dernières années, nous avons observé une véritable volonté politique d’augmenter l’utilisation de matériaux alternatifs dans le secteur du BTP. Petit retour en arrière sur les évolutions du contexte réglementaire :

  • La Loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (TEPCV) de 2015 intégrait plusieurs objectifs : recycler 70 % des déchets issus des chantiers de construction et d’entretien de routes de l’Etat et des collectivités territoriales à l’horizon 2020, intégrer des matières recyclées ou issus du réemploi dans les appels d’offres et diminuer de 50 % les déchets mis en décharge à l’horizon 2025, transposant ainsi la directive cadre sur les déchets.
  • La feuille de route Économie circulaire, publiée en 2018, prévoyait quant à elle la rédaction de guides en vue de favoriser la valorisation des déchets et la préservation des ressources naturelles. Elle prévoyait par ailleurs un plan quinquennal de programmation des ressources.
  • Les schémas régionaux des carrières et plans régionaux de prévention et de gestion des déchets avaient pour vocation notamment d’identifier les flux de déchets produits et les besoins en matériaux, pour favoriser l’utilisation de ces déchets en alternative aux matériaux issus de carrières.

Les matériaux alternatifs : de quoi parle-t-on ?

Nous pouvons distinguer différentes typologies de matériaux alternatifs. Ceux issus de différents process industriels comme les cendres de charbon, les mâchefers d’incinération de déchets non dangereux, les laitiers de l’industrie sidérurgique, les sables de fonderie, les réfractaires usagés, ou bien des granulats issus de béton de démolition, mais aussi les terres excavées et les sédiments. Ces gisements de matériaux alternatifs représentent des tonnages considérables.

Économie de ressources, réduction des émissions de CO2 : quels sont les freins ?

Toutes les planètes semblaient alignées pour favoriser la valorisation de matériaux alternatifs en BTP ; mais qu’en est-il réellement ? Où en est-on ? Quel est le bilan, plusieurs années après la publication de nombreux guides de valorisation, dans une période où la pression s’accroît sur les économies de ressources et la nécessaire décarbonation de nos activités pour lutter contre le réchauffement climatique ?

Aujourd’hui, la loi AGEC fait peser des exigences précises sur certains segments de la commande publique, imposant des taux d’intégration de matière recyclée dans les achats concernés, et un pourcentage de réemploi, avec un reporting national associé. Les chantiers routiers ou d’aménagement n’entrent toutefois pas dans les segments concernés qui donnent lieu à des exigences avec un suivi rapproché.

Les contraintes pesant plus lourdement sur les matériaux alternatifs que sur les ressources naturelles, un effet dissuasif est observé par les utilisateurs potentiels : statut de déchets avec son image négative, caractérisation accrue avec des seuils à respecter pour les déchets et non pour les produits manufacturés…

Des guides, publiés ou en cours d’élaboration, encadrent les conditions de valorisation de ces matériaux alternatifs, mais sont-ils toujours adaptés et proportionnés au regard des faibles exigences qui pèsent sur les ressources primaires ? Ou des réglementations applicables dans les pays européens voisins ? Et la mosaïque de guides divers ne rend-elle pas trop complexe pour la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre l’utilisation de ces matériaux alternatifs ?

D’autres textes réglementaires sur des sujets connexes sont également des freins : La réglementation sur les ICPE, qui ne favorise pas l’intégration de matières issues du recyclage dans certaines installations de fabrication, le ralentissement dans l’instruction des dossiers de sortie de statut de déchets. Les distorsions de réglementation entre les États membres de l’UE risquent d’entraîner des risques de transferts transfrontaliers, contraires au principe de proximité, de circuit court et à la transparence des filières.

Enfin, la complexité de ces sujets entraîne indubitablement une frilosité au niveau des maîtres d’ouvrages qui peinent à s’engager systématiquement dans l’utilisation d’éco-variantes pour leurs travaux. Une sensibilisation importante est à prévoir pour les accompagner dans de nouvelles façons de prescrire afin qu’ils s’engagent plus résolument dans des démarches d’économie circulaire et de solutions techniques bas carbone.

Provoquer de nouvelles opportunités pour les matériaux alternatifs

Les qualités intrinsèques des matériaux alternatifs sont-elles suffisamment reconnues et mises en avant ? Les efforts et investissements réalisés par les acteurs de la filière de valorisation des matériaux alternatifs ne risquent-ils pas d’être vains ?

Des avancées significatives s’imposent, au niveau de la réglementation ou de son application, mais aussi en termes d’innovation, de labellisation et de normalisation pour contribuer significativement aux économies de ressources et à la décarbonation des travaux du BTP. La situation n’est toutefois pas complètement négative, et des évolutions en cours ou à venir prochainement pourraient constituer de nouvelles opportunités.

Cet atelier permettra de débattre de ces sujets, avec des représentants des différentes parties intéressées : producteurs de matériaux alternatifs, entreprises utilisatrices, entités de recherche et experts du sujet. Au-delà des constats, seront abordés les freins et opportunités pour développer l’usage des matériaux alternatifs dans le BTP.


Les organisateurs

PILOTE

ANNIE PERRIER-ROSSET
Chef de projet environnement
EDF

CO-PILOTE

Loïc Danest

Loïc DANEST
Président
AFOCO