Déchets de chantier : l’expérience wallonne – Roger CROUGHS

En Wallonie, la problématique de la gestion des déchets inertes de chantiers a été traitée avec volontarisme. Mais, malgré des succès certains, le recyclage affronte encore de sérieux freins. Analyse de Roger Croughs, Président d’honneur – Conférence permanente des intercommunales wallonnes de gestion des déchets COPIDEC.

 

Comment s’est organisé l’effort de recyclage des déchets de chantier en Wallonie ?

En Wallonie, la politique de gestion des déchets inertes est intégrée à la gestion globale des déchets, qu’ils soient municipaux ou industriels. Suite à la régionalisation, les compétences en matière d’environnement relèvent quasi exclusivement des régions, s’appuyant sur les directives européennes et plus particulièrement sur la hiérarchisation des modes de gestion (prévention,réutilisation, recyclage, valorisation énergétique et élimination du résidu ultime minimum). Concernant les déchets de construction, cette volonté politique s’est traduite par la promotion de l’utilisation des produits recyclés pour préserver les ressources naturelles, c’est-à-dire très concrètement au niveau règlementaire par des conditions sévères faites au secteur, allant jusqu’à des interdictions de mise en centre d’enfouissement technique (CET), un décret fiscal incitatif, et un plan régional des CET arrêté en 1999.

 

Quels résultats ont été obtenus ?

L’ensemble de ces dispositions a eu pour effet de réduire de manière drastique la quantité des déchets de construction enfouis en CET, avec désormais une très faible proportion d’entre eux restant admis en CET de classe 3. Le secteur s’est bien adapté pour faire face à cette obligation. À titre d’exemple, le nombre de centres de recyclage de déchets inertes autorisés était de 45 en 1999, il est de 226 en 2012. Cependant, cela ne se passe pas sans soucis, notamment économiques. Les freins sont effectivement aussi très forts, d’abord parce que la production de granulats recyclés est désormais très importante mais aussi parce que la crise économique touche directement le secteur de la construction.

Hormis dans certaines régions, la concurrence avec les producteurs de granulats naturels n’a plus l’ampleur qu’elle a pu avoir : les uns et les autres ont trouvé leur place sur le marché, sans oublier l’élément externe extrêmement important qu’est le coût de transport des granulats du lieu de production à celui d’exploitation. Il n’empêche que la situation actuelle des recycleurs est globalement très difficile, avec des quantités de matériaux en stock très importante, avec bien entendu des impacts financiers non négligeables.

 

Quelles actions sont menées pour faire évoluer la situation ?

On a vu que la politique du gouvernement wallon est prometteuse pour le recyclage, mais le constat est que les résultats ne sont pas tout à fait à la hauteur de nos attentes. Pour tenter de faire évoluer cette situation, nous agissons à plusieurs niveaux :

  • le plus important est de poursuivre les efforts entrepris afin de faire évoluer encore la qualité des produits recyclés et donc de poursuivre l’évolution des techniques afin de ne plus mettre sur le marché que des produits « CE2+ » dans le cadre de la transposition de la Directive européenne « produits de construction » (89/106/CEE).
  • il nous faut aussi poursuivre les efforts en commissions techniques afin de faire évoluer les cahiers des charges type, sans vouloir concurrencer les granulats naturels pour les applications plus nobles. Il devrait y avoir suffisamment de place dans le marché pour chacun !
  • il nous faut également poursuivre la réalisation de projets pilotes à prix minima.
  • il nous faut enfin lutter pour sortir du vocabulaire le vocable « déchet inerte recyclé », au profit de celui de«produit recyclé ». Mais pour ce faire, il est indispensable que tous les producteurs respectent les normes de qualité.

 

Site internet COPIDEC : www.copidec.be