Le paysage gazier français change à grande vitesse. La consommation recule, les importations se transforment, et la production locale de gaz renouvelables progresse. Partenaires des Assises des déchets, les acteurs NaTran (ex-GRTgaz) et GRDF sont au cœur de cette transition, et les chiffres confirment une mutation profonde du mix énergétique.
En 2024, la consommation de gaz naturel en France est de 361 TWh, en diminution de 5,5% selon les données de NaTran. Après une baisse importante enregistrée depuis 2022 liée à des efforts importants de sobriété, les consommations résidentielles et industrielles sont restées stables. À l’inverse, la consommation des centrales à cycle combiné gaz a été marquée par une baisse importante (-56%).
Biométhane : la filière prend de la vitesse

Côté production locale, le biométhane continue son envol. En 2024, 11,6 TWh PCS ont été injectés dans les réseaux, en hausse de 22 % par rapport à 2023, dépassant les objectifs fixés par la PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Énergie).
Fin 2024, la France comptait 731 installations d’injection de biométhane en service, soit une capacité totale de 13,9 TWh/an. À cela s’ajoutent 983 projets en file d’attente, représentant 15,4 TWh supplémentaires à moyen terme.
Cette dynamique est notamment portée par le monde agricole, qui voit dans la méthanisation une opportunité économique et environnementale. Collecte de déchets organiques, valorisation des effluents d’élevage, production d’engrais naturels : les externalités positives sont nombreuses. Mais les obstacles restent réels avec des procédures administratives longues, un financement parfois complexe, et un besoin d’accompagnement technique renforcé.
Des importations sous tension
La baisse de la demande se traduit mécaniquement par une réduction des importations de gaz : en 2023, 532 TWh ont été importés, soit -16,7 % par rapport à 2022. Mais ce chiffre masque une recomposition géopolitique majeure.
Avec la guerre en Ukraine, l’Europe a réduit sa dépendance au gaz russe (passé de 45% à moins de 20% des approvisionnements de l’Europe) et renforcé ses liens avec d’autres pays fournisseurs, notamment via le gaz naturel liquéfié (GNL). En 2024, 57 % du gaz importé en France était du GNL, la positionnant premier point d’entrée du GNL en Europe.
Ces évolutions donnent à la France une position stratégique dans l’approvisionnement continental, mais posent aussi la question de la sécurité énergétique. L’enjeu pour les années à venir sera de réduire la dépendance globale aux énergies fossiles, importées ou non.
2025-2030 : la révolution des gaz renouvelables
La trajectoire est tracée : à horizon 2030, la France vise une production de 60 TWh de gaz renouvelables et bas carbone. Un objectif qui suppose une multiplication des projets, mais aussi une diversification technologique.
La méthanisation restera le pilier de la filière, mais d’autres solutions montent en puissance. C’est notamment le cas de la pyrogazéification qui permet de produire du gaz à partir de résidus bois ou de combustibles solides de récupération. Cette technologie, encore émergente, pourrait répondre à des gisements de déchets non valorisables par d’autres voies.
La gazéification hydrothermale, quant à elle, offre des perspectives pour les boues d’épuration ou les déchets très humides. NaTran mène actuellement plusieurs expérimentations sur ces technologies prometteuses.
La question du coût reste centrale. Si le biométhane est aujourd’hui compétitif grâce aux tarifs d’achat, le développement des autres gaz verts nécessitera des mécanismes de soutien adaptés que la prochaine loi de programmation énergie-climat devra clarifier.
NaTran : une nouvelle identité pour un nouveau cap
Le 30 janvier 2025, GRTgaz est devenu NaTran. Un changement de nom symbolique, mais surtout stratégique. Ce nouveau nom, contraction de “Natural Transition”, marque la volonté de l’entreprise d’accélérer sa mutation vers un réseau décarboné.
NaTran gère 32 500 km de canalisations à haute pression. L’entreprise investit massivement dans la modernisation de son réseau, l’adaptation à la variabilité des gaz renouvelables, et l’interconnexion avec les infrastructures européennes.
Elle est également active sur le terrain de la recherche, avec plusieurs démonstrateurs en pyrogazéification (dont celui de Nantes Métropole), et soutient des initiatives locales pour le développement de hubs territoriaux du gaz vert.
GRDF : un acteur majeur tourné vers l’innovation
GRDF facilite le raccordement des sites de production de gaz vert et optimise sa distribution. Le groupe exploite et entretient un réseau de 207 000 km. Il s’inscrit dans une trajectoire de décarbonation et se mobilise pour atteindre 20% de gaz verts dans les réseaux en 2030 et 100% en 2050.
GRDF soutient la filière de production de gaz renouvelables et s’engage dans des projets innovants tels que l’injection de biométhane dans le réseau de gaz naturel de la Métropole de Lille, la solution de Keon pour optimiser l’agitation des digesteurs sur les sites de méthanisation, ou encore le projet de l’entreprise Sarus pour améliorer l’efficacité énergétique de l’épuration du biogaz.