Johanna Rolland

Discours de Johanna Rolland

Présidente de Nantes Métropole

14e Assises des déchets
Ouverture du jeudi 28 Septembre à 9h

Bonjour à chacune et chacun, mesdames et messieurs,

monsieur le représentant de la Région,

chers collègues, chère Michèle GRESSUS, vice-présidente à la métropole en charge des déchets,

chère Maëlle COPPEY, vice-présidente à la métropole en charge de l’économie circulaire.

Comme vous le voyez nous sommes venues en équipe ce matin parce que le sujet qui nous rassemble est un sujet transversal, je crois que c’est ce qui en fait tout son intérêt et parfois aussi, de la théorie à la pratique, toute sa complexité.

Bienvenue à vous mesdames, messieurs. Ravie que vous ayez à nouveau choisi Nantes pour cette 14e édition des Assises des Déchets.

Deux jours de rencontres, de débats mais, vous l’avez rappelé, d’abord de recherches de solutions et dans une ville, dans une métropole où l’on conjugue l’ambition sur ces sujets mais aussi un certain pragmatisme, c’est un état d’esprit qui nous va bien.

Nous sommes les uns et les autres mobilisés autour de questions essentielles : comment aller toujours plus loin dans la réduction, le recyclage et la valorisation des déchets. C’est évidemment indispensable quand nous sommes, comme c’est le cas dans la métropole nantaise, particulièrement engagé pour faire de ce territoire un des territoires pionnier en matière de transition écologique. Je crois que dans une France parfois encore un peu trop jacobine à mon goût, avec une culture parfois encore centralisatrice, il est essentiel de rappeler que nos territoires, nos grandes métropoles notamment, sont des lieux d’expérimentation, d’innovation, d’imagination, et sur le sujet des déchets, je crois que la preuve en est faite tous les jours.

L ‘enjeu de la transition écologique il est évidemment d’abord global et l’actualité récente nous l’a rappelé durement. Je pense notamment aux effets toujours plus intenses du dérèglement climatique, l’ouragan Irma qui a dévasté St Barthélémy et St Martin était je vous le rappelle le plus fort cyclone jamais observé sur l’Atlantique. Une semaine avant Harvey avait dévasté Huston et la semaine dernière l’ouragan Maria sur les Antilles. Je rappelle cette actualité simplement pour rappeler l’impérieuse nécessité de l’urgence de l’action sur les sujets qui nous concernent.

Deux ans après les accords de Paris et de la COP21, quelques jours seulement après la seconde édition de Climate Chance à Agadir, je rappelle que la première avait eu lieu ici. C’était cette belle idée d’organiser un rendez-vous des acteurs non gouvernementaux de la lutte pour le changement climatique, entre la COP21 et la COP22. Chacun mesure l’importance d’agir à son niveau, là où il est dans ses responsabilités, pour faire concrètement avancer les sujets qui nous rassemblent aujourd’hui. Pour améliorer et développer toujours plus notre capacité collective de sobriété mais aussi de résilience sur ces enjeux. Il est absolument indispensable d’actionner l’ensemble des leviers, d’intervenir sur toutes les sources d’émission de gaz à effet de serre et évidemment de préserver les ressources quelles qu’elles soient. Les déchets de bien des façons, sont au cœur de ces défis car nos façons de produire, de consommer et de jeter ont des impacts directs sur l’environnement. Je pense particulièrement aux 300 millions de tonnes de déchets dans les mers et océans et à leur effet désastreux sur la faune, la flore mais plus globalement sur l’ensemble de la chaîne alimentaire. Je crois que de ce point de vue la conférence qui est prévue cet après midi promet un niveau d’échanges et de contenus sur ces sujets particulièrement intéressants.

La réduction, la gestion et la valorisation des déchets ont donc évidemment un rôle crucial dans ce défi majeur que représente aujourd’hui pour notre société la transition écologique. C’est pourquoi nous devons engager aujourd’hui une démarche volontariste de sobriété pour réduire la quantité d’énergie dépensée, consommée et à toutes les étapes de la gestion des déchets. Vous les connaissez par cœur je n’y reviens pas dans le détail. Mais surtout en premier lieu, il nous faut réduire le nombre de déchets produits et éviter le plus possible que ces déchets soient brûlés car ils sont de précieuses ressources. Il y a là je crois une vraie bascule : nous sommes à un moment où le monde d’hier est en train de se terminer et le monde de demain n’est pas tout à fait dessiné. Je crois moi que nos territoires sont un des lieux où l’on peut inventer ce chemin, entre le monde d’hier et le monde de demain. Sur la question des déchets je vois localement -et vous me permettrez de les saluer avec amitié- mais aussi nationalement des acteurs qui ont enclenché ce changement de paradigme vers une économie plus circulaire, vers des logiques de résilience assumées, vers la capacité à faire la preuve que c’est possible, y compris avec les enjeux d’équilibres économiques auxquels nous sommes naturellement les uns et les autres confrontés.

Tous ici, dans ces Assises, à notre niveau, nous avons une responsabilité pour améliorer le système que ce soit en permettant d’améliorer le cadre juridique, en favorisant ou en accompagnant l’innovation ou encore en organisant des contrôles renforcés parfois des sanctions au juste niveau, bref collectivement une belle opportunité, des partenariats gagnant-gagnant, de nouvelles coopérations aussi entre nos territoires, de nouvelles formes de collaboration entre les acteurs publics et les acteurs privés.

Je voudrais insister sur un élément qui me semble important : l’implication majeure, sans cesse renforcée, exigeante parfois dans le bon sens du terme, de citoyens, d’acteurs du territoire qui s’impliquent sur ces questions. Nous pouvons, nous devons nous appuyer sur eux. A Nantes on croit à l’expertise d’usage des habitants. Ce n’est pas simplement une formule, c’est d’abord un état d’esprit que de considérer que chaque citoyen est acteur là où il est et que la capacité d’initiatives, la capacité d’empowerment parfois des citoyens doit se conjuguer avec l’acceptation des responsables quels qu’ils soient de partager le pouvoir d’agir si on veut être collectivement plus efficace sur ces sujets. Ce sont ces synergies qui nous permettent d’inventer de nouveaux modèles dans ce monde en pleine transition.

Nos métropoles ont des atouts pour être ces lieux : l’agilité, la capacité d’expérimentation, la capacité d’innovation, la capacité à faire écosystème, la capacité à sortir de logiques parfois verticales et segmentées pour vraiment passer le cap d’approche globale et de solutions concrètes. C’est ce que nous faisons sur Nantes Métropole. Nous nous sommes résolument engagés sur le chemin de ces transformations, de ces transitions avec un objectif principal de réduire 50% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Notre engagement se fait à tous les niveaux dans la diversité des politiques publiques que nous avons à actionner pour permettre de passer de l’intention à la concrétisation. Évidemment une politique publique particulièrement volontariste en matière de déchets. Je voudrais saluer Michèle GRESSUS, ma vice-présidente pour son implication. Celles qui la connaissent ici savent son implication forte sur ces sujets, son professionnalisme extrêmement important mais aussi sa capacité à ne rien lâcher sur des sujets parfois compliqués. L’occasion m’étant donnée ce matin de la remercier publiquement, je le fais avec beaucoup de plaisir.

Chercher à réduire leur production, garantir l’efficience du service public, faire des déchets une ressource, c’est bien cela qui nous anime au quotidien. Sur la réduction de la production de déchets nous avons engagé des actions fortes, durables, diversifiées. Je veux m’y arrêter une seconde car, vous l’avez dit, ces Assises ont vocation à partager des solutions, à pouvoir regarder concrètement ce qui est susceptible de faire levier demain. Dans Nantes Métropole, entre 2010 et 2016, la production d’ordures ménagères par habitant à diminué de 33 kg et en 2016, 27,6% des déchets ont été évités sur l’ensemble des événements grands publics. Je crois que ces enjeux d’évaluation précise, quantitative et exigeante sont essentiels non seulement par rapport à la transparence à laquelle nous sommes les uns et les autres attachés, mais aussi pour se donner toujours les moyens d’aller plus loin.

Ces résultats sont issus de plusieurs actions qui sont venues se conjuguer : l’harmonisation de la collecte sur tout le territoire, la création d’un lieu d’information au cœur de Nantes, le “ comptoir du tri ”, où plus de 40.000 personnes sont passées en 2016. C’est dire si les enjeux de sensibilisation, d’éducation, d’information sont majeurs dans les sujets qui nous préoccupent.

Cela passe aussi par l’accompagnement de projets portés par des associations encore à l’animation du défi famille zéro déchet qui vise à réduire en 3 mois ses déchets. Cette expérience, que ce soit pour les habitants ou pour les professionnels qui l’ont accompagnée, a été marquante dans un changement d’échelle sur ces sujets. Le dernier défi a permis au 80 familles de réduire de 36% leur déchets. Cette exemple nous montre bien l’importance de cette capacité d’innovation dans les pratiques et les animations pour faire connaître les bons gestes de tri, inciter les habitants à changer leurs habitudes. A Nantes on ne goûte guère à une transition écologique qui serait punitive. A Nantes on goûte à la conduite du changement qui permet à chacune et chacun de trouver des opportunités dans cette transition écologique et c’est ce que nous faisons sur les déchets.

Le deuxième objectif c’est l’efficience sans cesse renforcée du service public. Elle ne peut être atteinte qu’avec le travail actif et engagé des opérateurs que je salue. Je connais leur engagement, il est pour nous absolument indispensable. Améliorer sans cesse les conditions de travail, optimiser les collectes, garantir un service de qualité au plus près des usagers et s’adapter en permanence aux différentes évolutions, tel est le défi qui nous est lancé.

Je voudrais également souligner les investissements dans les deux usines qui assurent le traitement des déchets sur Nantes Métropole pour moderniser et optimiser la valorisation énergétique. J’insiste sur ce point parce que c’est bien un écosystème, c’est bien une approche globale qui nous permet d’être en dynamique sur ces sujets et de le faire au delà même de nos frontières. J’attire votre attention sur la délégation de service public, la convention conjointe que nous avons passée, Nantes et Saint Nazaire, la Carène, pour l’exploitation de l’usine Alcéa. C’est une première en France et dans des Assises des Déchets, il est bon de pointer les innovations ; parce qu’elles disent les choses non seulement de notre rapport aux déchets, mais de la conviction que nous avons ici que la coopération entre les grandes villes de ces territoires est au service de l’ensemble du territoire et de celles et ceux qui nous entourent. Ce nouveau type de partenariat doit nous permettre de bénéficier d’une optimisation économique, technique, environnementale des installations existantes sur notre territoire. La complémentarité, la capacité à agir ensemble, reflète bien notre état d’esprit. Notre engagement, notre action volontariste, s’ils font leur preuve, ne doivent jamais nous inviter à nous en contenter. Ce serait contraire à l’esprit nantais. La devise de notre ville c’est Nantes favorise ceux qui osent. Sur ce sujet nous avons envie d’oser, de passer encore un cap, d’accentuer notre action, d’aller plus loin et parfois de faire différemment.

C’est dans cet état d’esprit que Nantes Métropole s’est engagée dans l’appel à projet national « territoire zéro gaspillage, zéro déchets ». Notre démarche se veut collective, exemplaire, pour parvenir à une réduction et une valorisation maximale des déchets dans une dynamique d’économie circulaire. Ce sont ces nouveaux modèles que nous tentons d’inventer ici avec cette volonté de placer l’usager et l’acteur au cœur de la démarche. Nous accompagnons les dynamiques et les innovations techniques et sociétales portées par les acteurs locaux qu’ils soient du monde de l’économie sociale et solidaire, du monde économique dans sa diversité. Quelques exemples concrets pour incarner les actions d’acteurs qui n’ont pas attendu l’action des collectivités locales sur ce sujet. Avoir des acteurs de la société civile dans sa diversité, acteurs économiques, culturels, engagés sur ces sujets, pionniers parfois exigeants est une chance pour un territoire car cela nous permet d’aller plus loin ou plus vite. Je pense à la Tricyclerie qui collecte à vélo les biodéchets d’une vingtaine de restaurateurs, je pense au vingt structures de réemploi partenaires de Nantes Métropole qui recyclent et réparent 720 kg de déchets chaque année, je pense à d’autres acteurs investis sur le compostage, Compostri, ou encore au commerce en vrac, Ô Bocal ou Green Shopper qui sont aussi des nouveaux acteurs. Ce qui est une chance dans l’évolution des territoires : avoir à la fois des acteurs historiques, solides, puissants qui sont là depuis de nombreuses années et puis des acteurs émergents que nous avons à cœur d’accompagner.

Enfin, je pense à celles et ceux qui organisent les événements écoresponsables, Aremacs, Planète événement. Je ne les citerai pas tous mais souhaitais vous faire partager cette dynamique territoriale, cette ébullition, ce fourmillement. Ce collectif zéro déchet 100% ressource en est la preuve. Il rassemble des acteurs de la société civile pour développer une nouvelle économie autour des déchets. Ces initiatives originales participent d’un écosystème en mouvement tel que je le décrivais et de notre volonté à accentuer nos résultats concrets.

C’est tout le sens du grand débat sur la transition énergétique que j’ai souhaité lancé sur la métropole. Partant de deux principes : d’abord que je ne me résous pas à dire que les hommes et les femmes ne s’intéressent plus à la chose publique, je crois que c’est parfois l’offre de la chose publique qui ne rencontre pas l’appétence des citoyens et avec 53.000 participants, 80 événements sur toutes les communes du territoire, 160 cahiers d’acteurs, nous avons ensemble relevé ce défi.

Il y avait dans ce grand débat sur la transition énergétique deux innovations : la première le confier à une commission totalement indépendante, que des citoyens, pas d’élus de notre collectivité locale. Nous leur avons confié les clés du débat et après quelques mois ils nous ont avoué deux choses d’abord que cela les avait passionné et ensuite que s’ils avaient su la charge de travail que cela leur aurait demandé ils hésitaient à savoir si ils auraient accepté ce défi. La deuxième innovation, c’était cette idée d’un débat du faire au delà du discours, au delà des approches conceptuelles absolument indispensables pour renouveler la pensée sur ces sujets. Nous avons considéré qu’il y avait urgence à être dans l’action et considérer ce grand débat comme un accélérateur de la transition énergétique. Aujourd’hui la commission indépendante nous a remis son rapport avec un certain nombre de préconisations. Nous allons avec les élus, avec les équipes, travailler aux suites à donner à ce grand débat mais ce que je peux d’ores et déjà vous faire partager c’est notre état d’esprit. La suite de ce débat ne sera pas simplement une feuille de route de la métropole. Bien sûr la collectivité locale en tant que telle doit jouer son rôle d’impulsion, d’exemplarité sur ce sujet mais aussi de capacité parfois à pouvoir fédérer des acteurs mais en tout cas pour faire vraiment d’un territoire, un territoire de référence c’est bien la mise en mouvement de l’ensemble d’un écosystème donc notre état d’esprit ce sera de proposer aux acteurs du territoire dans leur diversité une feuille de route partagée.

Quoi qu’il en soit des actions ont déjà vu le jour et dans ce débat ce qui nous intéressait c’était autant le processus que le résultat. Je pense à une opération très concrète « J’aime tes bocaux », un autocollant qui signale les commerces et les restaurants locaux qui acceptent que l’on apporte son récipient pour éviter les emballages. Je cite cet exemple parce que dans le grand débat nous avions lancé cette idée d’une communauté des défricheurs. L’idée était simple : un habitant qui se lance un défi avec ses voisins, par exemple de changement de mobilité, et qui ensuite entraîne son immeuble puis son lotissement. Cet exemple dit la capacité d’initiatives des citoyens mais aussi la nécessaire évolution de la position du service public et des collectivités. Un élu moderne ce n’est pas simplement un élu qui fait mais c’est parfois un élu qui permet de faire, qui crée les conditions de l’action pour les autres et pour les partenaires. En tout cas c’est dans cet état d’esprit que nous travaillons à Nantes et que nous vous accueillons aujourd’hui avec beaucoup de plaisir.

Je crois que le contexte actuel international, le choix du président des États-Unis de se retirer des accords de Paris a fait émerger partout dans le monde une forme de résistance des villes qui se sont levées pour dire que sur ces sujets nous allons agir. A Nantes nous aimons cet engagement mais au delà des mots nous aimons l’action.

Merci à vous d’avoir choisi notre ville, notre métropole pour partager d’abord des solutions. Nous avons besoin de votre regard, de vos expériences, de vos exigences, de nos évaluations partagées pour aller toujours plus loin sur ces sujets.

Merci à vous.

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