Consommer mieux : une responsabilité partagée

Lutter contre le gaspillage en consommant moins et mieux, telle est l’ambition portée par la loi Agec. Comment réussir à accompagner ses objectifs visant à mieux produire et à prolonger la durée de vie des produits ? Comment les secteurs de la réparation et du commerce se positionnent-ils ? De quelle manière les citoyens s’en saisissent-il et comment les sensibiliser ? Retour sur l’atelier 5 des 17e Assises des déchets. 

Votée en 2020, la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) amène de nouveaux objectifs : 

  • mieux informer les consommateurs, 
  • agir contre l’obsolescence programmée, 
  • lutter contre le gaspillage, 
  • interdire l’élimination des invendus 
  • favoriser le réemploi solidaire ou la réparation. 

Mais dans les faits, si 81 % des Français ont une bonne image de la réparation, seuls 36 % d’entre eux le font concrètement*. Le principal obstacle évoqué étant le coût et la démarche jugée encore trop contraignante. Comment, dès lors, inverser la tendance pour favoriser une consommation plus responsable ? 

Déconstruire les modèles, redonner du sens

Le premier enjeu est d’interroger les comportements individuels. Ceux-ci, influencés par un certain déterminisme (éducation, valeurs, richesse), sont aussi le fruit d’une économie linéaire — portée par l’ultra-consommation et la croissance — depuis plus de 60 ans. Consommer mieux et moins implique donc des changements politiques majeurs, des transformations économiques profondes, mais aussi que les modes de vie évoluent. Consommateurs, producteurs et politiques… Les responsabilités sont partagées.

Autre frein évoqué : le manque de sens et de visibilité sur des règles pouvant paraître arbitraires, à l’instar du tri des déchets en plastique dont les citoyens ne connaissent pas toujours le devenir. Information et prévention vont alors de pair pour les inciter à modifier leurs pratiques. Des associations — telles que l’UFC-Que Choisir ou plus localement, des collectifs d’habitants — et des collectivités territoriales comme la Métropole de Lyon œuvrent en ce sens.

Un État plus contraignant

La prévention ne peut cependant pas tout et, pour parvenir à des changements durables, le législateur doit être plus contraignant vis-à-vis des metteurs sur le marché. Pour exemple : le suremballage des produits vendus en magasins ou le manque de disponibilités des pièces détachées pour faire réparer leurs appareils… Suscitant chez les consommateurs un profond sentiment de décalage entre les objectifs de la loi Agec et la réalité perçue sur le terrain. 

Autres sujets sur lesquels l’État doit trancher : la concurrence des marketplaces internationales vis-à-vis des entreprises françaises du réemploi ou le débat soulevé par les fonds de réparation confiés uniquement aux éco-organismes. Associations, collectivités locales et acteurs du réemploi et de l’ESS attendent une politique nationale volontariste, plus efficacement engagée pour l’économie circulaire. D’autant que, selon Benoît Varin — cofondateur de Recommerce et président de la fédération Rcube — le contexte est favorable pour que le réemploi prenne de l’ampleur. 

Solutions alternatives et travail collectif

Cette politique volontariste sous-entend un soutien plus important aux acteurs français de l’économie circulaire (qui ne seraient pas forcément les plus connus) et aux solutions innovantes en matière de production, comme de réparation. 

Pour Bertrand Swiderski, directeur RSE et Développement durable du groupe Carrefour : « En matière de gouvernance aussi, il doit y avoir un changement de paradigme avec une gestion par l’ensemble des parties prenantes. Ce n’est pas qu’aux individuels, ou industriels, aux producteurs et aux distributeurs de porter la responsabilité ou de se renvoyer la balle. Il faut travailler collectivement dans la durée, car changer les comportements prend du temps. » 

* Les Français et la réparation, perceptions et pratiques, ADEME, 2019