La politique déchets vue par l’AMF – Jacques PELISSARD

Plus de 20 années de « politiques déchets », rythmées par les débats toujours prospectifs des Assises des Déchets… Interview de Jacques Pelissard, Président de l’association des Maires de France.

 

Dans votre analyse, quels sont les principaux progrès enregistrés sur cette période ?

La situation institutionnelle, politique, économique et technique a profondément changé. A l’époque, responsabiliser les habitants, les collectivités, les distributeurs et les entreprises semblait incongru, amener les différents acteurs à travailler en partenariat était difficilement imaginable. Organiser un recyclage important des déchets, créer des débouchés pour les produits de collectes sélectives, renouveler les techniques de collecte et de traitement, inventer les dispositifs de tri, mobiliser les citoyens, constituent autant de défis qui ont été relevés par les collectivités. Enfin, la modernisation des équipements de traitement et la lutte contre les décharges sauvages sont aussi importantes pour la préservation de l’environnement.

 

Et quels sont les principaux domaines de progrès qui restent a mettre en œuvre ?

Une évaluation objective de la politique menée ces 20dernières années est indispensable. La multiplication des REP nécessite d’introduire davantage de coordination. Le développement du marché des déchets à recycler et l’augmentation conséquente des recettes tirées de la vente des matériaux imposent également une réflexion sur le modèle économique souhaitable et possible.

La réapparition des dépôts sauvages préoccupe les élus, en particulier les maires. Il faut donc mieux cerner les motivations de la population. Nous avons peut-être trop accordé d’attention aux techniques au détriment de la compréhension des comportements et de leur évolution. Enfin, je suis particulièrement attentif au renouvellement du partenariat entre tous les acteurs et à la restauration de la confiance. Planification et Prévention sont devenus les«mots-clés » des politiques déchets.

 

Comment jugez-vous la pertinence, et la réalité des actions qu’ils induisent ?

Je déplore une tentation de plus en plus nette de passer d’une culture de la concertation et du consensus à une culture de la planification autoritaire. Par ailleurs, la propension de planifier sur des territoires de plus en plus vastes risque de faire perdre de vue les réalités de terrain et les contraintes matérielles. Une planification sans concertation avec les collectivités qui vont la mettre en place a de grande chance de ne pas être suivie d’effet.

La prévention relève du même esprit de lutte contre le gaspillage que la maîtrise de l’énergie. Elle nécessite donc un effort de sensibilisation d’ampleur nationale. Toutefois, elle ne peut pas constituer la seule composante d’une politique nationale de gestion des déchets.

 

Selon vous, quelles sont aujourd’hui les principales préoccupations « déchets » des territoires, et singulièrement des municipalités : aujourd’hui, et dans les années à venir ?

Aujourd’hui, les principales préoccupations « déchets » dans les territoires sont la maitrise des coûts, les conséquences de la mise en œuvre de la tarification incitative, la fragmentation des gisements collectés et le devenir des équipements des collectivités. La séparation toujours plus poussée des flux de déchets en fonction de leur nature conduit à augmenter mécaniquement les coûts. Par ailleurs, les déchets recyclables, qui sont susceptibles de permettre de générer des recettes, échappent de plus en plus aux collectivités, notamment dans les REP dites opérationnelles. Les collectivités sont donc face à un double mouvement : une séparation de plus en plus précoce des flux qui fait flamber les coûts et une disparition d’une partie du gisement rentable qui leur laissent les déchets les plus difficiles et les plus chers à traiter.

 

Site internet du ministère de l’environnement : www.government.nl/ministries/ienm