Succès du recyclage au Pays-Bas : analyse – Wilma MANSVELD

Les Pays-Bas ont encouragé avec succès une culture du recyclage. Analyse des actions menées, des résultats atteints et des projets en cours par Wilma Mansveld, Secrétaire d’État au Ministère néerlandais de l’infrastructure et de l’environnement.

 

Les Pays-Bas figurent parmi les pays dont l’Union européenne plébiscite le mode de traitement des déchets*, notamment le recyclage. Pouvez-vous expliquer les raisons d’une telle performance ?

(*rapport de la Commission européenne du 7 août 2012)

Depuis de nombreuses années, notre pays montre la voie en matière de gestion de déchets : environ78% des déchets néerlandais sont recyclés et 19% incinérés. Seul 3% vont dans les décharges, par opposition à une moyenne de 40% dans l’UE. Ces chiffres soulignent l’engagement de notre pays pour le recyclage, et reflètent le bon sens des affaires de la part des sociétés de traitement des déchets aux Pays-Bas. Encouragées par la politique européenne, elles se développent continuellement et introduisent de nouvelles techniques et méthodes de recyclage. La poursuite d’une meilleure gestion des déchets implique une recherche constante d’innovations et de nouveaux développements.

Il existe plusieurs raisons à nos bons résultats dans ce domaine. On peut citer premièrement, et peut-être la plus importante, la coopération étroite entre l’industrie et les autorités provinciales et nationales. Aux Pays-Bas, nous considérons le fait de travailler ensemble comme un facteur clef pour une gestion efficace des déchets. Le partage clair des responsabilités est une seconde raison. La législation et le plan national de gestion des déchets définissent clairement qui est responsable de quoi.

Une autre raison à notre succès est que nous avons très tôt compris l’importance du recyclage et de la protection de l’environnement. A la fin des années 60, nous avons découvert que la pollution environnementale aux Pays-Bas était bien pire que nous le croyions. Il en a résulté une législation sectorielle, c’est-à-dire des lois séparées pour chaque type de problème environnemental.

Une 4èraison est le concept de la responsabilité du producteur, introduit en 1990. Nous avons décidé que les producteurs devraient toujours être responsables de leurs produits lorsqu’ils deviennent déchets. Ceci est devenu plus tard un aspect important dans l’élaboration des législations nationales et internationales comme par exemple pour les VHU ou les DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques). Enfin, les facteurs financiers ont également joué un rôle important comme par exemple la taxe sur la mise en décharge, la responsabilité du producteur sur différents produits et des taux différentiels pour la collecte des ordures ménagères. L’introduction en 1995 de la taxe sur la mise en décharge a donné lieu à une forte baisse des dépôts et des injonctions pour atteindre une utilisation à pleine capacité des installations d’incinération. Parla suite, la taxe a pu être supprimée car les sociétés de traitement des déchets n’avaient plus besoin de cette mesure dissuasive pour recourir à la mise en décharge.

 

Comment s’articulent les différents modes de traitement des déchets aux Pays-Bas, sachant que l’incinération y est non négligeable ?

Comme je l’ai dit auparavant, seul 3% des déchets finissent à la décharge, tandis que 78% sont recyclés. L’incinération n’est donc pas la méthode principale de traitement aux Pays-Bas.

Le traitement des déchets est déterminé en fonction des flux. Cela prendrait plusieurs pages pour décrire le système entier, aussi je donnerai seulement une brève description. Actuellement, 75% de la capacité de décharge et 60% de la capacité d’incinération sont aux mains des pouvoirs publics. La ville d’Amsterdam, par exemple, dispose de sa propre structure d’incinération. D’autres sont la propriété de municipalités, comme HVC, gérée par 48 communes et 6 compagnies des eaux. Les autorités provinciales sont les actionnaires principaux d’entreprises comme Attero.

Les installations de compostage sont exploitées par des sociétés aussi bien publiques que privées, tandis que des entreprises privées effectuent la plupart des activités de recyclage : le broyage et le tri des déchets du bâtiment et de la démolition, le traitement et le recyclage du verre, du papier et des métaux, et ainsi de suite. La législation, connue sous le nom de«décrets produits », fixe les règles pour la collecte et le recyclage des divers flux de déchets, y-compris les voitures, les pneus, les appareils électriques, les emballages et les piles.

La collecte des ordures ménagères est sous la responsabilité des municipalités. Les autorités locales décident comment les ordures sont collectées et par qui (un service communal ou une entreprise). La collecte de tous les autres déchets est sous la responsabilité des entreprises et de l’industrie.

 

Quels sont les perspectives et les principaux projets de votre pays en matière de traitement des déchets ?

Nous devons changer la façon dont les gens considèrent les déchets en général et progresser vers une économie circulaire et une efficacité des ressources. En réussissant cette transition, le programme «Des déchets aux matières premières»est un instrument clef pour la ligne de conduite. Une économie circulaire signifie la réalisation d’une chaîne fermée au sein de laquelle les différents intervenants se connaissent, se comprennent et se complètent. Ainsi, lorsqu’un fabriquant de pots de fleurs veut utiliser du plastique recyclé, il est essentiel pour le recycleur de savoir à quels critères le plastique doit correspondre et, pour toutes les parties impliquées dans la collecte et dans le tri du plastique, de prendre ces exigences en considération. Une bonne coopération au sein des chaînes est un prérequis.

Le programme « Des déchets aux matières premières » se concentre sur la « meute » et les « chefs ». Ses principaux éléments sont l’utilisation stratégique des impulsions du marché, un cadre législatif dynamique qui promeut une croissance verte ainsi que des innovations et un gouvernement dans le rôle de partenaire de réseau. Les objectifs essentiels du programme sont la création d’instruments législatifs et financiers soutenant la transition vers une économie circulaire, l’encouragement du recyclage des matières brutes secondaires et la création d’un cadre d’innovation et de croissance. Le programme s’adresse également à des chaînes et des flux de déchets spécifiques, il encourage aussi le développement d’impulsions financières et autres aspects commerciaux.

Les Pays-Bas sont aux avant-postes mais des innovations et une coopération accrue sont nécessaires si nous voulons rester en tête. L’augmentation de 50% à 65% des ordures ménagères recyclées est un objectif important. Aux Pays-Bas, chaque personne produit environ 500 kg de déchets par an, ce qui correspond à environ 1,5 kg de déchets quotidiens. Pour le pays entier, cela remplirait quelques 24 stades de foot. Mais nous jetons toujours des matériaux précieux qui pourraient être utilisés dans la fabrication de nouveaux produits. Les autres objectifs importants sont la recherche d’une meilleure collecte, l’amélioration du recyclage de déchets d’emballages, en particulier les plastiques, et le ralentissement ou le bannissement de l’usage des micro-plastiques.

 

Site internet du ministère de l’environnement : www.government.nl/ministries/ienm